lundi 5 novembre 2012

Odysée chromatique #3 : Rose

Troisième épisode de notre recherche des couleurs avec cette fois-ci une nuance assez connotée la plupart du temps. Nous autre humains associons le rose au filles, souvent jeunes, et à quelques autres aspects moins avouables. Et ces sens sous-jacents rendent l'utilisation de cette couleur souvent orientée.
Mais la Nature, qui se prend beaucoup moins la tête que nous autres, ne se gène pas pour peinturlurer toutes sortes de choses avec son pinceau rose. La preuve.

Tout le monde a déjà pu admirer au moins un coucher de soleil flamboyant. Lassé du bleu, le grand peintre céleste se donne alors un petit moment de fantaisie, balançant de grands coup de peinture vive dans tous les sens. Ça ne dure pas longtemps, après quelques minutes le ciel se souvient qu'il n'existe pas de grand peintre céleste et il sombre doucement dans le bleu nuit.

Mis à part cet exemple, il faut bien avouer qu'une très grande partie des occurrences de rose dans notre environnement sont dues à un élément récurent de la photographie nature : les fleurs. Voilà bien une chose dont on pourra trouver des exemplaires quelque soit la nuance recherchée. Quelques exemples de ce que l'on peut trouver au rayon "Rose".

Vous connaissez probablement cette plante, mais sous une autre forme. Cette élégante clochette, suspendue à un rameau coriace, donnera quelques temps plus tard une baie bleu sombre que d'aucun nomment "Myrtille". Eh ben oui, avant d'être une tarte ou un coulis cette denrée est une plante (Vaccinium mytrillium), petit buisson bas des milieux froids à la délicate floraison que voici.

 Même nuance, autre usage, voici la Digitale pourpre (Digitalis purpurea), tirant son nom de la forme de doigts (mouais...) de ses fleurs en grappes pendantes. Affectionnant les endroits perturbés où les autres plantes n'ont pas encore eu le temps de s'installer (ce que l'on appelle une plante pionnière), ce végétal est pareil aux grandes dames des romans du temps jadis, comploteuses élégantes cachant sous leur robes un flacon de poison. Machouillez un morceau de Digitale et vous aurez l'occasion de constater la sévère toxicité de la plante.

 Peuplant comme l'héroïne précédente les lieux ou la concurrence est moindre, l’Épilobe (Epilobium sp.) dresse ses tiges parfois de belle taille (jusqu'à 2 mètres pour certaines espèces) au bout desquelles éclosent gaiement ces soleils roses. Plus tard dans la saison elles laisseront la place à ces longs tubes que l'on voit sur la photo qui s'ouvriront pour laisser s’échapper des graines laineuses que le vent emportera conquérir de nouveaux horizons.

 Le plus étrange pour la fin. Cette image n'est pas issue des plus récentes découvertes extraterrestres ou d'une coupe d'intestin d'éléphant. En fait elle a été prise dans mon jardin, au fond du potager à droite : il s'agit d'une fleur d'artichaut. Au fond cette plante fonctionne un peu comme les humains : elle commence petite, grandit sans faire beaucoup de bruit, s'orne de cheveux colorés quand elle atteint la taille adulte sans pour autant être mûre et finie terne et coriace. C'est beau non ?

Allez, cherchez donc un peu vous aussi, vous pouvez en trouver du rose. Et attention, les garçons aussi.

vendredi 26 octobre 2012

Odyssée chromatique #2 : Jaune

Deuxième round de la série couleurs ! Cette fois-ci occupons-nous d'une nuance vive entre toute, noyons-nous dans la contemplation du jaune.

Contrairement à l'image populaire qu'elles ont, les araignées ne sont pas toutes noires, velues et maléfiques. La bien nommée Argiope frelon (Argiope bruennichi) arbore fièrement ses rayures vives qui intimident tout prédateur ayant déjà eu affaire aux dards des frelons eux-même. Muni de ce déguisement efficace, elle peut se permettre de se dorer au milieu de sa toile tout le jour durant entre Juin et Septembre, devenant énorme à force de farniente et de festin.

L'Arnica (Arnica montana), appartenant à la famille des Asteracées comme la Marguerite, apprécie les espaces ouverts en altitude. Elle peut y déployer à loisir la longue tige au sommet de laquelle éclateront ces fleurs magnifiques que l'on repère de loin. C'est à partir de cette plante que sont confectionnés les petits granulés antidouleur homéopathiques bien connu dans leur petit tube bleu.


Plus étrange, ce champignon mystérieux lance vers le ciel ses bras ramifiés. Haut de ses quelques centimètres, il dépasse à peine de l'épaisse couche de mousse qui l'entoure comme un écrin. Il n'en est que plus délicat.


Hôte des rivières courantes, voici une libellule colorée : le Gomphe à crochets (Onychogomphus uncatus). Patrouillant la surface de l'eau d'un vol rapide et résolu, il n'aime rien tant que s'accorder une bonne pause sur une branche ou un caillou ensoleillé où on pourra l'approcher d'assez près. Mais gare, au moindre mouvement trop brusque l'animal s'envole, observe quelques seconde l'intrus puis va se poser un peu plus loin.

Le meilleur pour la fin, voici une plante que j'ai découvert cet été alors que, pataugeant tant bien que mal dans une tourbière refermée en bénissant l'inventeur des bottes en caoutchouc, je m'évertuais à attraper des libellules bien trop agiles pour moi. Au détour d'un bosquet, me voila nez-à-nez avec un bouquet de ces magnifiques fleur éclatantes. Subjugué, j'ai mené quelques recherches qui m'ont donné le nom de ces belles enchanteresses : l'Ossifrage (Narthecium ossifragum). Ce nom lui a été donné à l'époque ou l'on pensait que sa consommation par le bétail fragilisait les os de ce dernier.

Mais ce n'est pas tout. De très nombreux groupes d'espèces animales ou végétales comprennent au moins un membre arborant cette fière couleur. Alors allez-y, essayez d'en trouver le plus possible. Il s'en trouve partout.

lundi 15 octobre 2012

Odyssée chromatique #1 : Vert

Premier article pour ce nouveau blog. En guise d'inauguration, je lance une série d'au moins 6 articles dédiée à ce qui fait une bonne part du charme esthétique de la nature : les couleurs. Nuances innombrables, délicates ou agressives, motifs simples ou extravagants, l'environnement regorge de tout ce dont on peut rêver en terme de pigmentation. Alors pourquoi ne pas faire en faire un petit tour.

Et bien sur, quelle autre couleur que le vert pour le premier article de la série ? Omniprésent, il compose la base chromatique de la vie terrestre et s'impose en la majorité des milieux. Profitons-en vite avant qu'il ne disparaisse dans l'explosion chromatique automnale.
Une plante, fusse-t-elle Chêne centenaire ou Pin antédiluvien, commence toujours par n'être qu'une graine puis un petit bout de radicule ridicule. Sur la photo ci-dessus, on aperçoit encore les deux premières "feuilles" de la plantes (en bas), sans nervures, bien différentes de celles qui pousseront ensuite. Ces deux feuilles sont formées à partir des organes de réserves présents dans la graine, les "cotylédons", et sont les premiers organes de la plante à pouvoir effectuer la photosynthèse, c'est-à-dire l'utilisation de la lumière solaire en vue de créer des sucres. Ce processus s'effectue au moyen de la chlorophylle (qui n'est pas qu'un goût de chewing-gum), substance verte qui donne leur couleur à la grande majorité des plantes que nous côtoyons.



Les plantes nous semblent sans défense, immobiles qu'elles sont à nos yeux de mammifères hyperactifs. Rien n'est plus faux. Qui d'entre vous pourrait, à l'instar des buissons ci-dessus, repousser comme si de rien n'était après le passage d'un incendie ? De telles conditions, extrêmes à nos yeux, ne rebutent pas pour autant les coriaces végétaux. Résister au feu, au froid, à la coupe, au vent, à la noyade, à la sécheresse, ce ne sont là que quelques-unes des prouesses de nos voisines chlorophylliennes. Partout ou presque elles ont réussi à s'adapter, chaque habitat abrite sa ou ses espèces particulières.

Et voilà qu'à leur tour les plantes forment les milieux eux-mêmes. Modifiant les lieux où elles s'implantent, elle font apparaître des habitats en constante évolution abritant une faune et une flore changeante. Ce tapis de jeunes Fougère aigle (Pteridium aquilinum) n'est qu'un stade temporaire de la forêt. Au fil des années d'autre espèces vont s'installer, formant un fourré dense d'arbustes et arbrisseau. Puis s’installeront des espèces plus imposantes, des arbres comme les bouleau déjà présents qui fermeront le milieu, l'ombrageant et formant finalement une toute jeune forêt. Celle-ci restera probablement en place jusqu'à la prochaine perturbation, que ce soit un ouragan ou une coupe forestière.

Mais enfin, les plantes n'ont pas l'apanage de la couleur verte. De nombreux animaux l'ont également adoptée, souvent dans une optique de camouflage et parfois dans un but plus mystérieux. Ce Calosome sycophante (Calosoma sychophanta), posé sur son gris caillou, semble dans un contexte peu propice aux couleurs vives. Hélas, le timide n'a pas voulu répondre à mes questions et c'est avec beaucoup de chance que j'ai réussi à en prendre ce cliché alors qu'il s'enfuyait.

Ayant appris de mon expérience, je me suis approché discrètement de ce tout jeune Lézard vert (Lacerta bilineata). Point encore mature, il n'arbore que timidement la couleur dont il se parera avec éclat à l'age adulte. Mais avant d'être bijou il lui faut être discret, évitant toutes les mésaventures qui peuvent arriver à une bestiole de cette taille, usant de ses teintes passe-partout pour se fondre dans un décor de feuilles mortes et vivantes. Laissons-le donc en paix.


C'en est fini pour ce minuscule tour d'horizon des occurrences du vert dans cette nature qui nous entoure. Ne prétendant pas être exhaustif, je ne saurais que vous inciter à aller chercher vous-même les merveilles que cette simple couleur permet d'admirer. Partout, en toute saison, le vert est là, même bien caché. Cherchez-le.